La fiscalité du contrat de capitalisation

Placement d’épargne à moyen et long terme, le contrat de capitalisation partage de nombreux points communs avec l’assurance-vie tout en s’en distinguant au moment de la transmission. Ce guide propose un panorama complet : impôt sur le revenu lors des rachats ou d’une rente viagère, droits de succession et donation, IFI, mais aussi traitement spécifique pour les personnes morales.

Fiscalite Contrat De Capitalisation
Mathieu Barthelemy
Par Mathieu BARTHELEMY Modifié le 06/10/25 à 15:21

Comprendre l’ADN du contrat de capitalisation

Un produit d’épargne, pas un contrat sur la vie

Juridiquement, le contrat de capitalisation est un instrument d’épargne destiné à capitaliser des sommes versées. Il n’assure pas un risque de décès et n’est pas lié à la durée de vie du souscripteur. Il peut être souscrit par une personne physique (majeure ou mineure) comme par une personne morale.

Supports, horizon et liquidité

Le contrat peut être monosupport en euros ou multisupport avec des unités de compte (OPCVM, parts de SCPI, OPCI, trackers, etc.). Les UC visent un meilleur potentiel de rendement en contrepartie d’un risque de perte en capital. L’épargne reste accessible : un rachat total ou partiel est possible à tout moment.

Assurance-vie vs capitalisation : l’essentiel en une phrase

L’assurance-vie prévoit une clause bénéficiaire et se dénoue au décès, alors qu’un contrat de capitalisation entre dans la succession et peut être donné du vivant du titulaire, tout en conservant son antériorité fiscale.

À noter : les différences fiscales qui subsistaient avant 2018 ont été largement harmonisées par la mise en place du prélèvement forfaitaire unique (PFU) pour les primes versées depuis le 27 septembre 2017.

Fiscalité des rachats pour les personnes physiques

Base imposable : seule la part d’intérêts compte

Lors d’un rachat, la somme perçue comprend une part de capital (vos versements) et une part de produits (intérêts, plus-values). Seule la part de produits est imposable à l’impôt sur le revenu (IR) selon l’antériorité du contrat et la date des primes.

Comment isoler la quote-part d’intérêts en cas de rachat partiel ?

Montant du rachat partiel – ([total des primes versées à la date du rachat × Montant du rachat] / Valeur de rachat totale à la date du rachat)

Cette formule proportionnelle évite de sélectionner « au doigt mouillé » les intérêts : elle répartit au prorata capital et produits dans chaque rachat.

Régime des primes versées avant le 27 septembre 2017

Pour les produits rattachés à ces primes, la taxation peut se faire, sur option, via un prélèvement forfaitaire libératoire (PFL) selon l’ancienneté du contrat :

  • 35 % si le rachat intervient avant 4 ans ;
  • 15 % entre 4 et 8 ans ;
  • 7,5 % au-delà de 8 ans (avec abattement annuel de 4 600 € pour une personne seule ou 9 200 € pour un couple) ;

À défaut d’option, l’imposition suit le barème progressif de l’IR.

Régime des primes versées depuis le 27 septembre 2017

Les produits afférents à ces primes relèvent du PFU :

  • 12,8 % si le contrat a moins de 8 ans au jour du rachat ;
  • À partir de 8 ans : 7,5 % pour la fraction de produits attachée à des primes nettes ≤ 150 000 €, puis 12,8 % au-delà.

L’abattement annuel de 4 600 € / 9 200 € s’applique après 8 ans, toutes sources confondues (assurance-vie et capitalisation). Le contribuable peut opter pour le barème de l’IR (option globale sur l’année pour les revenus de capitaux mobiliers).

Prélèvements sociaux

Les produits sont soumis aux prélèvements sociaux de 17,2 %. La CSG est partiellement déductible (6,8 %) uniquement en cas d’option pour le barème de l’IR.

Attention
la déductibilité de la CSG n’est pas ouverte en cas de choix du PFL ou du PFU.

Cas d’exonération d’IR lors d’un rachat

Dans certaines situations de vie, les produits peuvent être exonérés d’IR (hors prélèvements sociaux, sauf cas spécifiques) : invalidité 2e ou 3e catégorie, licenciement, fin de CDD, retraite anticipée, liquidation judiciaire. Le rachat doit intervenir avant la fin de l’année de l’événement.

Bon à savoir
certains contrats très anciens peuvent conserver des régimes d’exonération sur les produits afférents à des primes antérieures à des seuils historiques (selon les dates de souscription et de versements).

Focus pratique : synthèse des taux

Situation Régime d’imposition des produits
Primes avant 27/09/2017, rachat < 4 ans PFL 35 % (ou barème)
Primes avant 27/09/2017, rachat 4–8 ans PFL 15 % (ou barème)
Primes avant 27/09/2017, rachat > 8 ans PFL 7,5 % après abattement 4 600 €/9 200 € (ou barème)
Primes après 27/09/2017, contrat < 8 ans PFU 12,8 % (option barème possible)
Primes après 27/09/2017, contrat > 8 ans 7,5 % ≤ 150 000 € de primes nettes, puis 12,8 % au-delà (abattement 4 600 €/9 200 €)

À noter : au-delà de l’IR, ajouter systématiquement 17,2 % de prélèvements sociaux sur la fraction imposable de produits.

Cas particuliers : contrats britanniques après le Brexit

Les contrats souscrits auprès d’assureurs britanniques par des résidents fiscaux français ne bénéficient plus des abattements de 4 600 €/9 200 € ni du taux réduit de 7,5 % (pour les versements post 27/09/2017) pour les rachats réalisés depuis 2021, hors fenêtres transitoires prévues à l’époque. Cette spécificité demeure pour les rachats concernés et doit être vérifiée dossier par dossier.

Transformer le contrat en rente viagère : quel traitement ?

Principe de la rente

En cas d’aliénation du capital au profit d’une rente viagère, les intérêts accumulés ne sont pas imposés au moment de la conversion. En revanche, la rente perçue est partiellement imposable à l’IR selon l’âge du bénéficiaire lors de la liquidation :

Âge du rentier à la liquidation Part imposable de la rente
Moins de 50 ans 70 %
50–59 ans 50 %
60–69 ans 40 %
70 ans et plus 30 %
Important
la fraction imposable est figée à la liquidation et ne bouge plus ensuite. En cas de réversion, c’est l’âge du plus âgé des bénéficiaires qui est retenu pour déterminer la fraction imposable initiale.

À noter : la rente viagère supporte les prélèvements sociaux de 17,2 % et ne bénéficie pas de l’abattement de 10 % applicable aux pensions.

Transmission : décès, donation et cession du contrat

Au décès du souscripteur

Le contrat de capitalisation n’est pas dénoué au décès ; il intègre l’actif successoral pour sa valeur vénale au jour du décès et suit le régime des droits de succession de droit commun (exonération du conjoint survivant, abattements en ligne directe, démembrement pris en compte selon l’âge de l’usufruitier, etc.). Les héritiers se substituent au défunt et conservent l’antériorité fiscale du contrat.

Bon à savoir
le décès a pour effet de purger l’IR et les prélèvements sociaux sur les produits acquis avant le décès. En cas de rachat ultérieur, seule la valorisation post-décès est imposable chez les héritiers.

Donation et maintien de l’antériorité

Le contrat peut être donné (en pleine propriété ou démembré) de manière très efficace. La date de souscription initiale est conservée pour le donataire, ce qui maintient l’antériorité fiscale (abattement après 8 ans, seuil de 150 000 € pour le 7,5 %, etc.). Pour l’IR futur, seuls les gains post-donation seront imposables chez le nouveau titulaire.

Cession du contrat : comment sont taxés les gains ?

La cession du contrat à titre onéreux est possible ; le gain de cession correspond à la différence entre le prix de cession et le prix d’acquisition. L’imposition suit les règles des produits décrites plus haut. Pas d’abattement annuel de 4 600 € / 9 200 € sur une simple cession.

IFI : quelle assiette retenir ?

Principe

En principe, les contrats de capitalisation constituent des actifs financiers et sont hors IFI.

Exception pour les supports immobiliers

La fraction représentative de biens et droits immobiliers via certaines UC (par exemple des SCPI, des SCI, ou certains OPCI) doit être intégrée à l’assiette IFI à due proportion.

Attention
le simple fait d’être « multisupport » ne suffit pas à entraîner l’IFI ; seule la part immobilière des supports est visée.

Personnes morales : IR et IS, deux régimes distincts

Sociétés à l’IR (translucides)

Dans une société soumise à l’IR (SCI, holding patrimoniale, etc.), les produits d’un rachat sont taxés chez les associés personnes physiques selon leur quote-part, avec les mêmes options que pour un contrat détenu en direct : PFU (12,8 % ou 7,5 % selon l’antériorité et le seuil des 150 000 €), PFL pour les primes antérieures au 27/09/2017, ou barème de l’IR. Les prélèvements sociaux sont dus annuellement sur le fonds en euros et lors des rachats sur UC.

Sociétés à l’IS (non translucides)

À l’IS, le contrat est assimilé à un bon de caisse et comptabilisé en trésorerie. Chaque année, les intérêts courus sont déterminés de manière forfaitaire en revalorisant l’épargne investie à 105 % du TME (taux mensuel des emprunts d’État à long terme) en vigueur au jour de la souscription. Cette taxation est une avance fiscale : elle est régularisée au rachat, à la cession ou à l’échéance en comparant intérêts réellement générés et intérêts déjà imposés (complément ou trop-payé imputé).

Bon à savoir
lorsque le TME de référence est négatif sur la période de souscription, il peut ne pas y avoir de taxation annuelle en l’absence de rachat. Le cas s’est présenté sur certaines fenêtres en 2019.

Intérêt patrimonial pour la trésorerie d’entreprise

Sans plafond de versement, faiblement consommateur de temps de gestion (accès à des supports diversifiés), le contrat de capitalisation peut compléter un compte à terme ou un OPCVM monétaire dans une stratégie de placement excédentaire, avec une visibilité fiscale maîtrisée.

Usages patrimoniaux et combinaisons gagnantes

Quand privilégier un contrat de capitalisation

  • Transmission : conservation post-décès par les héritiers, qui héritent de l’antériorité fiscale.
  • Donation : transfert avec maintien de l’antériorité, y compris en démembrement (utile en remploi de fonds déjà démembrés).
  • Optimisation conjointe : une fois les abattements spécifiques de l’assurance-vie utilisés, le contrat de capitalisation permet d’optimiser les abattements de droit commun en succession.
Important
supports en unités de compte : ni le rendement ni le capital ne sont garantis. La répartition entre fonds en euros et UC doit correspondre au profil de risque, à l’horizon et aux objectifs.

Fiches pratiques

Checklist express pour une donation de contrat

  • Identifier le mode de transmission : pleine propriété ou démembrement (usufruit/nue-propriété).
  • Vérifier la valeur vénale retenue et l’assiette des droits de donation.
  • Acter le maintien de l’antériorité fiscale pour le donataire.
  • Planifier les versements futurs et la gestion (abattement après 8 ans, seuil de 150 000 €).

Déclaration à l’IR : repères utiles

Les produits doivent être reportés dans les cases adéquates (déclaration n° 2042), en distinguant les primes avant et après le 27/09/2017 et l’option fiscale choisie (barème, PFU, PFL). Les références exactes de cases évoluent au fil des années : se référer à la notice de campagne en cours.

Attention
en cas d’option pour le barème, penser à la déductibilité partielle de la CSG (6,8 %) sur le revenu imposable l’année suivante.

FAQ

Quelle différence majeure entre assurance-vie et contrat de capitalisation ?

La clause bénéficiaire : elle n’existe pas en capitalisation. Au décès, le contrat n’est pas dénoué et entre dans la succession. Les héritiers peuvent le conserver en profitant de son antériorité fiscale.

Le contrat est-il pris en compte pour l’IFI ?

Les contrats sont hors IFI en tant qu’actifs financiers. Seule la part représentative de l’immobilier dans les UC (SCPI, SCI, certains OPCI) est à intégrer à l’assiette, à proportion.

Comment sont imposés les rachats après 8 ans ?

Après 8 ans : abattement annuel de 4 600 € (célibataire) ou 9 200 € (couple). Pour les primes post 27/09/2017, la fraction de produits rattachée à des primes ≤ 150 000 € est à 7,5 %, l’excédent à 12,8 % (PFU), en plus des 17,2 % de prélèvements sociaux.

Une rente viagère issue du contrat est-elle entièrement imposée ?

Non. Seule une fraction de la rente est imposable (70 %, 50 %, 40 % ou 30 % selon l’âge à la liquidation). La fraction reste constante dans le temps. Les prélèvements sociaux de 17,2 % s’appliquent et il n’y a pas d’abattement de 10 % comme pour les pensions.

Peut-on donner un contrat de capitalisation sans perdre l’antériorité ?

Oui. La donation (y compris en démembrement) conserve l’antériorité fiscale. C’est un atout pour optimiser la transmission tout en gardant les avantages d’un contrat ancien.

Comment se calcule la part d’intérêts lors d’un rachat partiel ?

Par une formule proportionnelle :

Montant du rachat partiel – ([total des primes versées à la date du rachat × Montant du rachat] / Valeur de rachat totale à la date du rachat)

Qu’en est-il pour une société soumise à l’IS ?

Le contrat est assimilé à un bon de caisse : chaque année, taxation forfaitaire des intérêts courus à 105 % du TME de référence, puis régularisation au rachat/échéance. Il s’agit d’une avance fiscale et non d’une taxation définitive.

Les contrats britanniques bénéficient-ils des mêmes abattements ?

Depuis le Brexit, les contrats souscrits auprès d’assureurs britanniques par des résidents fiscaux français ne bénéficient plus, pour les rachats postérieurs à 2020, de certains régimes (abattement 4 600 €/9 200 €, 7,5 %) hors transitions limitées dans le temps. Vérifier la situation précise du contrat.

Quels atouts face à l’assurance-vie quand les abattements sont saturés ?

Le contrat de capitalisation permet d’optimiser les abattements de droit commun en succession, de donner le support tout en conservant l’antériorité, et de poursuivre la gestion post-décès par les héritiers.

Y a-t-il un plafond de versement ?

Non. Aucun plafond légal de versement, ce qui en fait un outil pertinent pour des montants élevés (particuliers et personnes morales), sous réserve de la cohérence profil de risque / supports.

À noter : toutes les sources transmises sont accessibles et intégrées. Aucun blocage d’accès à signaler.

À lire aussi : Les avantages et les inconvénients d’un contrat de capitalisation

Mathieu Barthelemy

Mathieu Barthélemy accompagne les créateurs d'entreprise dans leurs démarches juridiques, allant de la sélection du statut juridique à la gestion des obligations réglementaires, en fournissant des conseils pratiques et adaptés aux besoins de chaque entrepreneur.